La fondation d’entreprise Ricard

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Depuis 1999, la fondation est un lieu d’exposition et de soutien à la jeune création française. Il s’agit du lieu qui met en action le travail de mécénat de la Société Ricard. Il y a en moyenne cinq expositions par ans avec de nombreux curateurs venus de plusieurs horizons du monde de l’art contemporain. Clara Balayer nous a accueilli. Elle est responsable de la médiation et du développement des publics depuis peu. Ses ambitions sont d’ouvrir les portes de la Fondation à des publics plus éloignés de ce monde réservé aux étudiants et aux collectionneurs. Elle vise des publics en réinsertion sociale – des anciens détenus – les salariés Ricard et leurs familles, mais aussi des personnes handicapées et des scolaires. Le souci concernant les scolaires, c’est que la loi Evin, qui limite les contenus des publicités en faveur de l’alcool, empêche d’accueillir du jeune public au sein de la Fondation Ricard. J’ai trouvé intéressant qu’elle mentionne des nouveaux publics et en expliquant ce qu’était la marque Ricard aux élèves étrangers qui ne connaissaient pas, il est vrai que l’image de la marque est encore cantonnée à un alcool kitsch, qui caractérise le stéréotype du français moyen. Je trouve ça intéressant car l’image même de la marque et de ce qu’elle représenter serait un atout finalement pour attirer des publics qui ne la connaisse qu’en tant que consommateurs d’alcool. Pourquoi pas faire la promotion de la Fondation directement via la vente des bouteilles ou de parler de créer de la médiation pour des publics vraiment inconnus au monde de l’art pour rendre plus facile la passerelle entre la marque, la Fondation et le consommateur « lambda ».

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La Fondation Ricard accueille en son sein l’exposition Poème Prolétaire organisée par François Piron, un commissaire d’exposition passionné de la contre-culture. J’ai déjà trouvé très discutable le fait d’organiser une exposition d’un passionné de contre-culture dans un univers comme celui-ci. Poésie Prolétaire voit son nom inspiré d’une revue et de l’importance des mots des artistes qui, je cite « sont un peu brouillon dans leurs mots pour expliquer leurs œuvres. » Pourtant, si on en croit le dictionnaire, prolétaire veut bien dire « personne qui ne peut attendre de ressources que de la rémunération que lui alloue celui auquel il loue ou vend sa force de travail » sous-entendu le salarié aux revenus modestes. Je n’ai pas bien compris l’intérêt de rattacher ce mot à son étymologie – proletarius venant du latin, qui veut dire lignée – autrement dit pour donner un caractère plus bourgeois au mot lui-même. Il s’agit de s’accaparer la culture prolétaire pour en faire quelque chose de bourgeois, ce qui est plutôt commun dans le milieu de l’art contemporain de la part de certains.

Pour en revenir à l’exposition, François Piron s’est appuyé sur Thérèse Bonnelalbay – une artiste femme décédée à l’âge de 48 ans en 1980 – une rencontre du milieu alternatif – Joëlle de la Casinière – et plusieurs artistes trentenaires comme Anne Bourse. Il a cherché des artistes au premier abord éloigné de l’art contemporain. Il est vrai que Joëlle de la Casinière, pupille de la nation et sans racines, a toujours été considérée dans le contre-mouvement de l’art contemporain, ne se qualifiant pas d’artistes et refusant d’exposer de manière conventionnelle : Il s’agit en effet d’une femme éloignée de l’art contemporain, des Beaux-Arts et de la vie parisienne, ayant réalisé plusieurs métrages, ayant fondé le Montfaucon Research Center, concentré sur la poésie graphique et l’art de vivre. Cependant, la scénographie de l’exposition ne laisse pas du tout transparaître cette importance de la contre-culture de François Piron.

Nous avons donc eu le droit à une visite guidée de l’exposition, et Clara Balayer nous a indiqué vouloir faire une médiation plus axée sur l’accessibilité pour tous les publics, mais les supports de médiation, les trames de visite et la scénographie est décidée par les commissaires d’exposition. Ici, le médiateur ne devient qu’un exécutant, qui doit respecter les directives des curateurs. Je trouve ça vraiment dommage et cela montre que si la direction du développement des publics est prête à faire le pas pour ouvrir ses portes à d’autres publics, il n’est pas dit que cela se fasse car la direction générale de la Fondation reste tout de même dans son univers mondain de l’art contemporain.