L’ahah et sa réflexion du lien artiste/galerie.

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Penser le rapport entre la galerie et l’artiste autrement. C’est ce que nous ont expliqué Marie Cantos et Doria Tichit, directrice artistique et directrice manager de L’ahah. Cette structure a été notre refuge pendant cette semaine intensive, alors que notre groupe d’étudiant avait papillonné tous les jours durant en long et en large de Paris. L’ahah, c’est la rencontre entre deux galeries, celle de Marine Veilleux et celle de Pascaline Mulliez. Ces deux femmes avaient respectivement leur galerie rue de Montmorency et étaient insatisfaites du rapport entre le marché de l’art et le rapport avec les artistes. Une galerie, en général, laisse peu de place à l’expérimentation. Depuis 2017, L’ahah accompagne donc 14 artistes qui se sont regroupés autour des deux fondatrices. Il faut comprendre que d’ordinaire, les galeries ont avant tout un enjeu économique lié aux artistes qu’ils représentent. Toutes les actions faites pour un artiste doivent être rentables, sinon, une galerie peut vite se retrouver la clé sous la porte. À savoir qu’il faut prêt de 20 000€ pour obtenir un stand dans une foire, près de 40 000€ pour la FIAC. Et bien souvent il est bien compliqué de la part des galeries de rentrer dans leurs frais quand il s’agit de représenter de jeunes artistes, car l’économie de ces structures sont fragiles.

Pour l’anecdote : Le terme d’ahah vient du vieux français, c’est un terme venant du paysagisme. Il s’agit des trous en losange qu’on retrouve dans les palissades en bois. Marine Veilleux vient de la littérature et a choisi ce nom avec Pascaline Mulliez pour représenter le fait qu’elles ont fait face à un mur dans leur expérience de galeriste ; avec ce projet, elles ont tenté une percée.

Il y a des prémices de collaboration auprès de certains artistes représentés par L’ahah, comme Enrico Bertelli et Vincent Hawkins. L’ahah rue Griset permet un hébergement d’artistes pour un an. Enrico Bertelli est resté à L’ahah à la suite de cette résidence. Parfois, des artistes qui ne sont pas admis en résidence sont tout de même contactés pour faire parti de l’Ahah malgré tout.

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Le projet de l’Ahah repose avant tout sur le temps. Cette petite association aux grands moyens permet une liberté d’exécution qui ne laisse aucune pression aux artistes. Ils soutiennent pleinement les artistes en leur laissant d’ailleurs le droit de se détacher d’un projet s’ils ne sont pas prêt. Ils aident dans tous les cas à la visibilité des artistes, et c’est quelque chose que j’apprécie tout particulièrement. Ils sont un peu l’exception qui retire toute la pression sociale à des artistes. Comment et pourquoi ? Parce qu’ils n’ont pas de contrainte d’argent à proprement parlé. En effet, ils sont assurés par un don pérenne anonyme, qui permet de faire fonctionner l’équipe et la structure. L’équipe promet d’ailleurs 5 ans d’accompagnement avec la possibilité de rediriger les artistes à la suite de ces 5 ans, vers des galeries qu’ils connaissent. Ils peuvent donc aider pleinement les artistes, pas seulement pour les exposer mais aussi les aider à simplement rédiger un portfolio, les aider à créer leur site internet etc.

Ils soutiennent également des artistes qui ont de l’expérience mais peu de visibilité, qui ont minimum 10 ans d’expérience derrière eux. Il est vrai que dans les galeries modernes, on peut laisser apparaître un certain jeunisme qui est stigmatisant pour des artistes de plus de 35 ans qui n’ont pas une assez grande visibilité et qui sont mis dans l’ombre. Nous avons beaucoup parlé justement, de cet âge des artistes, de la multiplicité des prix qui fait que bien souvent, les jeunes artistes peuvent avoir trop d’assurance et ne prennent pas le temps de faire leurs armes.

Grâce à la rencontre de Marie Cantos et Doria Tichit, nous avons pu découvrir qu’il y avait aussi des gens bienveillants dans le monde des galeries – un monde qui ne me parle pas vraiment d’ordinaire – mais elles ont aussi permis de discuter de la réalité des métiers liés à la culture via leurs expériences personnelles. Marie Cantos a souligné d’ailleurs le fait qu’il y ait parfois trop d’enjeux politiques autour des Biennales et autres gros évènements culturels, tandis que Doria Tichit a insisté sur sa vision didactique et sur l’importance des filières professionnalisantes comme la nôtre, puisqu’à la sortie de ses études à Paris IV, elle n’a eu aucune passerelle vers le monde professionnel.

Le reste de l’équipe, composé de Brice, Mathilde & Milene ont pu partager avec nous leur expérience, avant l’Ahah et aujourd’hui. Deux d’entre eux viennent de l’école du Louvre et ont vécu diverses expériences avant de trouver l’Ahah. On note la nécessité de saisir les opportunités mais aussi un certain niveau de vie de départ pour se permettre de multiplier les expériences. Dans le cas contraire, ce qui a aussi été mentionné, les stages qui se multiplient sont une autre façon également de subvenir à ses besoins pécuniers.